top of page
  • Photo du rédacteurCharles

Quand l’Europe découvre l’Asie



Un extrait d’une lettre rédigée en 1499 par un commerçant italien basé à Lisbonne alors que Vasco de Gama s’en retournait des Indes. Elle nous montre les interrogations de l’époque, les centres d’intérêts et surtout l’abyssale méconnaissance des Indes, de l’Asie en général. L’homme d’affaire vient de recevoir la primeur des nouvelles en provenance des Indes :


It is now 80 years since there arrived in this city of Chalicut certain vessels of white Christians, who wore their hair long like Germans, and had no beards except around the mouth, such as are worn at Constantinople by cavaliers and courtiers. They landed wearing a cuirass, helmet, and vizor, and carrying a certain weapon attached to a spear.


Their vessels are armed with bombards, shorter than those in use with us. Once every two years they return with 20 or 25 vessels. They are unable to tell us what people they are, nor what merchandise they bring to this city, save that it includes very fine linen-cloth and brass-ware. They load spices. Their vessels have four masts like those of Spain.


If they were Germans it seems to me that we should have some notice about them ; possibly they may be Russians if they have a port there. On the arrival of da Gama we may learn who these people are...


N’en déplaise à ceux qui se plaisent à réécrire l’Histoire de l’esclavage en ce moment, une glorieuse épopée s’ouvrait. L’Europe est avide d’or, d’épices, de chrétiens (la prise de contact avec le fabuleux royaume du prêtre Jean était l’un des ordres de mission de Vasco de Gama), bref Portugais, Espagnols, Italiens, etc. tous veulent rafler la mise.


Malheureusement les Occidentaux s’aperçoivent qu’ils ne sont pas les seuls sur le coup. D’abord il y a les Mahométans que l’on vient de vaincre (prise de Grenade 1492, la grande revanche après la chute de Constantinople en 1453) qui ressurgissent aux Indes au grand déplaisir des premiers portugais qui croyaient débarquer en terre chrétienne. Ensuite il y a les potentats hindous avec qui les relations sont complexes. Un quiproquo notoire illustre le gouffre entre Asie et Europe. Vasco de Gama tient absolument à voir en eux des Chrétiens, bizarre peut-être, mais des chrétiens quand même. A peine débarqué à Calicut il se rend dans une église pour remercier Dieu d’être arrivé à bon port. Là, il s’agenouille devant une représentation de la Vierge Marie, elle est à moitié nue, peinturlurée en bleue et si elle n’a pas le bras long, elle l’a multiple, une représentation de Shiva probablement. Il faudra quelques temps avant que les Occidentaux admettent qu’il existe d’autres religions que celles du Livre. Enfin l’Occident tombe sur une peuplade inconnue qui a déjà tissé des liens avec les Indes.


A la première lecture je n’ai pas franchement saisi, de qui l’auteur parlait, 80 ans avant Gama, des Occidentaux, des chrétiens en sus ?!? What ? On sent les doutes qui percent « s’ils étaient… » En même temps ils sont biens organisés, lourdement armés et ont les mêmes objectifs…


Finalement c’est le bon souvenir de Cheng Ho (ou Zheng He) et de ses baochuan, les fameux « bateaux-trésor » de l’Empire du Milieu. Le grand explorateur chinois a établi des liens commerciaux 80 ans avant les Portugais. Même si l’Empire s’est claquemuré dans sa grandeur décadente, les commerçants chinois n’ont pas renoncé au commerce au loin.


Vu que c’est dans l’air du temps, Cheng Ho n’est pas si différent des Portugais. Ses liens commerciaux il les créa plus ou moins par la sujétion. A l’occasion le grand amiral fit raser des “nids de pirates” (pirates = individus posant des entraves au commerce chinois, une définition suffisamment large pour s’étendre à tous ceux qui ne font pas partie des réseaux agréés de l’Empire du Milieu) sur l’océan indien. De toute façon on ne peut refuser grand-chose à un homme qui s’appuie sur la plus grosse armada de l’époque et une armée très conséquente.


A part cela, vu les dernières nouvelles covidesques, on ne voyagera plus dans les temps à venir. Au XXXème s. quand les nouvelles générations redécouvrirons enfin les Indes, ils auront en mains des guides remontant au XXIème s. Ce sera quelque chose, déjà faudra qu’ils puissent déchiffrer le français archaïque d’aujourd’hui.

10 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page